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Ricardo Sa Pinto: « Je ne suis pas un dictateur »

Ricardo Sa Pinto tire un premier bilan de son retour au Standard et préface la saison capitale des Rouches.

Un mois après son retour au Standard, Ricardo Sa Pinto a accordé sa première interview individuelle. Pour La DH/Les Sports, le coach portugais évoque ses débuts à la tête des Rouches. Il préface aussi la saison qui s’annonce cruciale.

« C’est vrai », admet-il. « Après deux saisons compliquées, le Standard doit revenir à sa vraie place. Le potentiel est là pour y arriver. Après, beaucoup de paramètres entrent en jeu. Mais on va tout faire pour atteindre notre objectif qui est de renouer avec les playoffs 1. »

Quel bilan tirez-vous après vos trois premières semaines de travail ?

« Le bilan est très positif. Je n’ai encore connu aucune déception. Nous avons beaucoup travaillé. Dire que nous sommes prêts à 100 % serait mentir. Quand un nouveau coach arrive avec une nouvelle vision, il faut plus que trois semaines pour faire passer ton message et faire jouer ton équipe comme tu le souhaites. Mais j’ai pu voir du positif en possession et en perte de balle, j’ai pu voir des joueurs concernés et appliqués par rapport à ce que je leur demande. Et je peux vous dire que nous faisons tout pour préparer la reprise et être performants dès le début du championnat. »

Avez-vous changé les règles du vestiaire ?

« Je ne suis pas un dictateur, je ne suis pas policier : je suis entraîneur de football. Et j’entraîne des joueurs de football professionnel, des hommes. Pour les professionnels, pour les hommes, il ne faut pas beaucoup de règles… On a un accord pour faire notre route et tout le monde sait ce qu’il peut faire et ce qu’il ne peut pas faire. »

Vos prédécesseurs se sont plaints de la mentalité du vestiaire. Qu’en pensez-vous ?

« Le passé, c’est le passé. Je respecte les personnes qui ont travaillé ici. Mais jusqu’à maintenant, je n’ai pas à me plaindre. Je vois des joueurs déterminés à changer la situation et à remettre le Standard en haut du classement. Je vois un vestiaire uni avec une bonne mentalité. »

Il y a un an, la préparation physique n’avait pas été optimale. Votre groupe est-il prêt physiquement pour votre style de jeu avec un gros pressing et beaucoup d’efforts ?

« Je ne peux pas encore les entraîner pour qu’ils jouent comme je le veux. Je dois respecter leur état physique actuel. Mais on va monter en puissance pour qu’ils soient aptes. C’est vrai que je leur demande beaucoup d’efforts, mais je leur demande surtout de savoir à quel moment ils doivent fournir l’effort. Nous allons travailler cela aux entraînements : chaque joueur saura ce qu’il a à faire en possession, en perte de balle, le moment où il faut presser ou non pour que cela se fasse en équipe, etc. Jamais un joueur n’ira sur le terrain sans savoir ce qu’il doit faire. Cela augmentera nos chances de succès. »

Ce qui augmenterait vos chances, ce serait aussi de garder les cadres, comme Belfodil ou Sa. Or on sait qu’ils pourraient partir. Avez-vous discuté avec eux ?

« Oui. Ils m’ont dit qu’ils étaient heureux ici et qu’ils sont focalisés sur le Standard. Si on arrive à garder les meilleurs, ce sera fantastique. Mais parfois ce n’est pas possible. Même si on fixe une deadline, on n’est jamais à l’abri d’une offre qui ne se refuse pas. Et il faut aussi penser à l’intérêt du Standard. »

Y a-t-il un jeune qui, comme Witsel à votre époque, pourrait éclore cette saison ?

« Tous les jeunes s’entraînent bien mais c’est trop tôt pour dire que tel jeune va devenir un joueur important cette saison. Ce que je peux dire, c’est que Moussa (Djenepo) a des qualités de un contre un, de vitesse, de créativité… Il a des qualités que tu ne sais pas entraîner : tu l’as ou tu ne l’as pas. C’est quelque chose que tu ne vois pas souvent, que ce soit en Belgique ou en Europe. Après, il y a aussi des choses à travailler, pour qu’il sache ce qu’il doit faire en fonction de la place où il est aligné, pour savoir quand presser, quand garder ou donner le ballon, etc. Mais j’espère qu’il pourra montrer son potentiel. Mais je souhaite cela pour tous mes joueurs… » (sourire)

« Cissé aurait pu être utile, mais il voulait partir »

Le noyau mis à disposition de Ricardo Sa Pinto a déjà pas mal bougé depuis la reprise. Ochoa et Agbo sont arrivés, Cissé et Andrade sont partis.

« Cissé est un très bon médian, qui a des qualités que j’aime. Il aurait pu apporter quelque chose ici, mais il voulait partir, déjà avant que j’arrive. Si un joueur a la tête ailleurs, il ne faut pas le retenir. Andrade a eu une bonne proposition. Avec la venue de Pocognoli, il savait qu’ils étaient à trois pour une place et qu’il ne jouerait peut-être plus autant. Il voulait aussi partir. »

Il y a d’autres joueurs qui doivent partir. Et certains d’entre eux auraient bien voulu recevoir une nouvelle chance, comme l’avait laissé entendre Ricardo Sa Pinto lors de sa conférence de presse de présentation.

« C’est vrai que j’avais dit que tout le monde repartait de zéro. Mais quand je suis arrivé, il y avait un groupe qui avait été fait avec les joueurs que le club voulait garder. Certains joueurs n’en faisaient pas partie. J’ai respecté la décision. Sinon on se serait retrouvé avec 38 joueurs à l’entraînement… »

Pour Olivier Renard , ce trop grand nombre de joueurs était la raison principale de l’échec des prédécesseurs de Ricardo Sa Pinto. Mais le Portugais ne veut pas trop s’attarder sur les échecs du passé.

« Il y a des infos qui peuvent être utiles. Mais je préfère me fier à ce que je vois, à ce que je sens. J’ai regardé des matchs de la saison passée, mais pour voir des joueurs individuellement, pas pour voir ce qui n’a pas marché collectivement. Il y a beaucoup de paramètres qui entrent en jeu et qui font que tu réussis ou tu échoues. Je suis certain que les coachs précédents ont tout donné. Comme je vais le faire. J’ai donné la ligne directrice à mes joueurs et je maintiendrai le cap, que l’on perde ou que l’on gagne, car je pense que c’est en gardant notre ligne de conduite que nous remettrons le Standard à la place qui est la sienne. »

« On a éliminé l’équipe à 500 millions »

Le meilleur moment de son travail : « Quand j’arrive au club. Quand je vais pouvoir faire ce que j’aime. »

Le pire moment de son travail : « Quand je quitte la maison. Si ma famille pouvait m’accompagner sur le terrain, ce serait parfait (rires) . Ici, ma famille ne m’a pas accompagné. Mes filles étudient au Portugal, ma femme reste avec elles… »

Son match le plus accompli : « La double confrontation contre Manchester City en 8e de finale d’ Europa League en 2011-2012. On avait gagné – staff et joueurs – grâce à la stratégie, pas grâce à la force de l’équipe. City, à l’époque, c’était l’équipe à 500 millions. Porto avait joué contre eux et avait perdu 4-0 en Angleterre et 0-2 à domicile. Au Portugal, les gens disaient qu’on allait en prendre 12… Et nous nous sommes qualifiés. Malheureusement, cette saison-là, nous avons manqué la finale à cause d’un but en toute fin de match lors de la demi retour, contre l’Athletic Bilbao de Marcelo Bielsa. »

Son entraîneur référence : « Co Adriaanse. Quand j’étais joueur, je me souviens avoir joué un match contre une équipe moins forte que nous mais qui avait joué mieux que nous. C’est l’AZ Alkmaar de Co Adriaanse, en demi-finale de Coupe Uefa la saison 2004-2005. On s’était qualifié pour la finale, mais l’AZ m’avait impressionné. Après, Co Adriaanse a signé à Porto et il a tout changé. Les joueurs, le système, le capitaine… et Porto a tout gagné. Et tu voyais la patte de l’entraîneur. Il jouait en 3-4-3, parfois en 3-3-4 ! À partir de ce moment-là, je me suis intéressé au travail de Co Adriaanse. J’ai aussi d’autres références : Mourinho, Conte, Simeone… »

Son match le moins accompli : « Quand j’ai perdu la finale de Coupe du Portugal, aussi en 2012, contre Academica. À la fin du match, je me suis demandé : ‘ Mais que s’est-il passé ? Comment a-t-on pu perdre ce match ? ’ C’est peut-être à cause de la demi-finale perdue en Europa League qui trottait encore dans la tête de mes joueurs. La plus grande erreur de ma carrière jusqu’à maintenant, c’est d’avoir perdu cette finale . »

« Les Portugais ne sont jamais fatigués de gagner »

Leonardo Jardim qui ramène le titre à Monaco après 17 ans d’attente. Sergio Conceição qui joue les pompiers à Nantes et redresse complètement le club. Ricardo Sa Pinto qui signe au Standard. Ces quelques exemples démontrent que, à la suite du maître José Mourinho, les coaches portugais ont le vent en poupe ces derniers temps. La raison ?

« Nous sommes travailleurs, passionnés de foot. Nous avons la mentalité pour vivre cette vie de sacrifices. Nous aimons ça », répond Ricardo Sa Pinto. « Nous avons aussi eu de bons entraîneurs au Portugal, quand c’était un championnat un peu moins médiatisé. C’est Mourinho qui a ouvert la porte. Aujourd’hui, les clubs européens ont davantage donné la chance aux entraîneurs portugais de montrer ce qu’ils savent faire. »

Il y a aussi eu une évolution dans la formation des entraîneurs.

« Les cours d’entraîneur sont aussi plus exigents. Avant, cela durait un mois, maintenant, c’est un an avec des stages. Moi, j’ai eu l’occasion d’aller voir Mourinho à l’Inter, à Madrid. »

Pour le coach du Standard, c’est aussi une question de mentalité.

« On est des éternels insatisfaits : on veut toujours chercher ce qu’on peut améliorer. Comment améliorer le leadership, comment travailler tel aspect spécifiquement, comment être plus fort tactiquement, etc. Cela demande beaucoup d’investissement, de temps, mais on aime cela. Mais quand tu vois que le travail porte ses fruits, que ton équipe croit en ton travail et joue comme tu le souhaites, cela fait plaisir. Comme la reconnaissance que l’on reçoit aujourd’hui. »

Certains trouvent que le succès monte parfois à la tête de certains compatriotes de Ricardo Sa Pinto. Et que cela les rend arrogants. C’est le cas pour José Mourinho et Cristiano Ronaldo.

« Aucun des deux n’est arrogant », répond le T1 rouche. « Mourinho, c’est de la stratégie. C’est une bonne personne, très sympa, il rigole toujours. Mais comme entraîneur, sa communication, c’est de la stratégie. Pour Ronaldo, s’il dit quelque chose qui peut paraître arrogant, c’est seulement quand on ne le respecte pas. Ce n’est pas quelque chose de spontané, c’est une réaction. Mais c’est aussi une bonne personne. Il a commencé avec moi, au Sporting, quand il avait 17 ans, avec Laszlo Bölöni. Ronaldo était le premier à l’entraînement, il travaillait énormément. Encore maintenant, il a la même ambition. Ronaldo a tout gagné, mais il n’est pas fatigué de gagner. Mourinho n’est pas fatigué de gagner. Je ne suis jamais fatigué de gagner. J’ai besoin de cela. Si je suis fatigué, c’est quand je perds… » (rires)

« Avec Lucien et Laszlo, l’Antwerp fera du bon travail »

En revenant en Belgique, Ricardo Sa Pinto retrouve un club qu’il a connu en 2006-2007. Il retrouve aussi Lucien D’Onofrio et Laszlo Bölöni, tous deux actifs à l’Antwerp.

« Lucien D’Onofrio est un ami, c’est lui qui m’a fait venir ici comme joueur », commente Sa Pinto. « Laszlo Bölöni a été mon coach : nous faisons partie de la dernière équipe du Sporting à avoir été champion du Portugal, en 2002. Il insiste beaucoup sur le travail physique et sur la relation avec ses joueurs. Nous serons rivaux lors des matchs contre l’Antwerp, mais, pour le reste, je leur souhaite le meilleur. Avec ce duo, l’Antwerp va certainement faire du bon travail. »

C’est aussi ce que tout le monde attend de Ricardo Sa Pinto au Standard, qui a déjà quelques années d’expérience comme coach.

« J’ai déjà fait du bon travail avec les jeunes en gagnant le championnat U19 avec le Sporting. Comme coach principal, j’ai amené Belenenses en phase de groupes de l’Europa League pour la première fois en 107 ans. C’était fantastique car on avait un petit budget et on jouait avec 100 % de joueurs portugais, dont plusieurs jeunes que nous avions recrutés en deuxième division. En Serbie, j’ai fait du bon travail en amenant l’Étoile Rouge à la deuxième place. En Grèce, j’ai repris une équipe en cours de saison – OFI – alors qu’elle était dernière du championnat et je l’ai fait remonter à la 6e place et en demi-finale de Coupe. J’ai aussi atteint les demi-finales de l’Europa League avec le Sporting. Je vais tout donner pour faire des résultats au Standard également. »

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