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L’Académie attend toujours le nouveau Witsel

Que « pèse » encore l’Académie Robert Louis-Dreyfus qui a produit tant de talents ? Longtemps victime, au niveau international, de sa réputation, le centre de formation du Standard est confronté aujourd’hui, dix ans après son inauguration, à une forte concurrence des clubs belges.

Outil performant et fonctionnel inauguré le 2 mai 2007, l’Académie Robert Louis-Dreyfus semble avoir perdu un peu de son charme. Et de son attrait. Référence, il y a peu de temps encore, aux yeux de l’Europe entière et véritable propagande pour le football belge, le centre technique du Standard, qui avait nécessité un investissement de 15 millions d’euros, tarde à faire éclore les successeurs d’Axel Witsel, Marouane Fellaini, Christian Benteke et autre Mehdi Carcela. « Je ne vis pas avec le passé », explique tout de go Ingrid Vanherle, la directrice générale du centre de formation liégeois. « Ce qui m’intéresse, c’est l’avenir. Le Standard est toujours le 1er club formateur belge et le 23e en Europe, sur base du nombre de joueurs pros formés par les clubs et actifs dans les championnats de 1re division. C’est donc la preuve qu’on sort de bons joueurs et que notre formation est de qualité, à l’image de la réussite de Landry Dimata à Ostende. Le seul bémol, c’est que ces éléments ne passent pas tous par notre équipe première… »

Bruno Venanzi le sait pertinemment, lui dont le début de présidence avait été marqué, à l’été 2015, par le départ des plus belles pépites de l’Académie. Adrien Bongiovanni avait décroché un contrat pro à Monaco, Zinho Vanheusden à l’Inter Milan et Thibaud Verlinden à Stoke, pour ne citer qu ceux-là. Aussi le patron de Sclessin entend-il accorder plus d’attention et de moyens au centre de formation de son club, devenu sa priorité. Il s’en était ouvert vendredi dernier au Cercle de Wallonie, en expliquant qu’à l’horizon 2020, « 35 % des joueurs du noyau pro devront être directement issus de l’Académie, pour 21 % aujourd’hui. Et 50 % de l’effectif pro devra rassembler des éléments ayant passé deux ans à l’Académie ».

Mais ce discours optimiste dépassera-t-il le stade des louables intentions ? C’est que s’il était confronté, jadis, à la concurrence des grands clubs étrangers, le Standard l’est aussi, aujourd’hui, au niveau national, Genk et La Gantoise développant, en la matière, des politiques très agressives. Avec des sommes d’argent importantes à réserver aux jeunes pousses que ces clubs souhaitent placer sous contrat.

« Là où le Standard était en avance sur les autres, c’était sur la qualité de ses infrastructures », confie Ingrid Vanherle. « Ce n’est plus le cas aujourd’hui, Anderlecht et Genk disposant eux aussi de complexes très fonctionnels. C’est donc sur la qualité de la formation qu’il faut aujourd’hui faire la différence. Sur le projet sportif, la qualité des entraînements, l’encadrement, en sachant qu’on privilégiera toujours les joueurs de qualité qui croient en notre projet et défendent les valeurs véhiculées par le Standard à ceux qui ne voient que l’aspect financier des choses, parce que sur ce plan-là, nous ne sommes pas en mesure de nous aligner ».

Si Jérome Deom, Ibrahima Ba, Anaxis Dinsifwa, Dimitri Lavalée et Alexandro Cavagnera constituent aujourd’hui les plus belles promesses du club principautaire, c’est surtout les catégories U12 à U15 qui monopolisent l’attention, parce qu’elles renferment ceux qui, demain, ont le plus d’atouts au bout du pied pour rejoindre un jour l’équipe première. À condition de pouvoir les conserver ou d’attirer de nouveaux talents pour compenser les départs… Et c’est le cas jusqu’ici, même si les recommandés relatifs aux désaffiliations peuvent arriver à l’Académie jusqu’à vendredi et que c’est à ce moment-là seulement que les comptes pourront être faits. L’exode annoncé sera-t-il évité ? Sans doute. Car s’ils sont quelques-uns à avoir choisi d’aller voir si l’herbe était plus verte ailleurs, à l’instar, chez les U15, de Jérôme Cavelier qui a opté pour La Gantoise et de Yunus Bahadir qui poursuivra sa formation à Genk, le Standard a gommé ces départs en attirant, essentiellement des jeunes de Charleroi, Genk et… Eupen. « On sait que Genk a contacté 15 de nos joueurs, appartenant à la même catégorie d’âge », dit encore Ingrid Vanherle. « On ne mange pas de ce pain-là. Comme Anderlecht, on préfère cibler, en donnant la priorité à la mentalité du joueur. Et à ceux qui sont convaincus, parce que c’est le cas, que c’est le Standard qui offre à ses jeunes la plus belle occasion de jouer en équipe première. »

Pas de projet sportif et une cafétéria en attente

S’il souffre, à l’évidence, des résultats catastrophiques de l’équipe première, à laquelle les jeunes s’identifient, le centre de formation du Standard perd, chaque année, quelques-uns de ses plus beaux fleurons. Pourquoi ?

1. Pas vraiment de projet sportif et pas beaucoup d’argent à mettre C’est la critique numéro 1 : si certains parents désaffilient leur enfant du Standard, c’est en raison de l’absence de tout projet sportif (« Il faut améliorer l’accompagnement de nos talents vers le noyau pro », reconnaît Bruno Venanzi), mais aussi parce qu’à l’instar de La Gantoise, les grands clubs belges sont capables de mettre beaucoup d’argent sur la table pour attirer les jeunes les plus prometteurs. En direct ou via la technique, légale, du porte-fort qui, par laquelle, en échange d’une somme versée aux parents d’un joueur qui n’a pas encore 16 ans, ceux-ci s’engagent à ce que le joueur signe son premier contrat pro le jour de son 16e anniversaire. « Cela représente beaucoup d’argent et cela reste donc, chez nous, exceptionnel », confie Ingrid Vanherle, la directrice générale de l’Académie. Il n’empêche, des efforts financiers ont été entrepris par le patron de Sclessin pour faire face à la concurrence belge.

2. Plus de cafétéria : cela n’arrange pas les parents qui viennent de loin La fermeture, à l’été 2015, de l’Espace Brasserie, qui surplombait les terrains, a porté un coup dur à l’Académie, passée d’un espace semi- ouvert à un espace fermé, permettant aux jeunes d’évoluer dans un milieu exclusivement dédié à l’apprentissage du football. Au grand dam des parents qui, venant parfois de loin, sont depuis dans l’obligation d’attendre leur progéniture à l’extérieur du site. En délicatesse avec les agents, qu’il entendait ainsi chasser, Roland Duchâtelet avait décidé de transformer cette cafétéria en de nouveaux locaux. « Au départ, on aurait dû construire une cafétéria trois étoiles, pas cinq », explique Ingrid Vanherle.« C’était trop chaleureux. On n’avait pas l’impression d’être dans un club de foot. Désormais, on travaille dans le calme, comme les grands clubs étrangers le font ». Dans quelques mois, une cafétéria, moins importante, sera reconstruite à l’entrée du site.

3. Football et scolarité : ce n’est pas toujours très facile à concilier… « Au Standard, ce n’est pas du footétudes, mais de l’étude-foot », lâche une maman. Qui veut dire que le système mis en place par le club liégeois est lourd à supporter, en termes d’horaire, pour les jeunes pousses, qui s’entraînent tout en se soumettant à un programme scolaire complet. « Notre ligne directrice, c’est de former des sportifs de haut niveau, en leur permettant de suivre une formation scolaire qui est très importante », dit Bruno Venanzi. « Parce qu’il y a, en foot, beaucoup d’appelés et peu d’élus… » Ingrid Vanherle opine du bonnet : « C’est un choix. Ici, le football ne remplace pas les heures de cours. L’horaire scolaire est complet. Ce double projet est essentiel pour ceux qui ne réussiront pas dans le football… » De Witsel à Carcela, les exemples sont nombreux qui montrent que la combinaison des deux est possible.

Deux entraîneurs pour les U13 à U15

Sur les hauteurs du Sart-Tilman, des projets se mettent en place pour redynamiser un centre de formation dont la réputation a pris un coup depuis deux ans. Au niveau des infrastructures d’abord puisque, on le sait, le Standard va déposer dans quelques jours un permis relatif à la construction de quinze studios destinés à héberger des jeunes joueurs, aujourd’hui logés, à plusieurs, dans des villas, sans aucun contrôle. « Ils auront un service nutritionnel suivi », insiste le président Venanzi, « parce que l’hygiène de vie est fondamentale ». Dont coût, 3 millions d’euros. À côté de cela, la qualité de la formation sera renforcée. Si Ingrid Vanherle parle d’un « projet encore en construction », on sait qu’il a été convenu que, dès le début de la saison prochaine, les catégories U13, U14 et U15 seraient prises en charge par deux éducateurs (entraîneurs), au lieu d’un actuellement, ce qui permettra d’organiser des séances de travail plus spécifiques mais aussi plus pointues. Le choix de ces catégories n’est pas innocent : aujourd’hui, ce sont les U12 et U14 (qui seront U13 et U15 la saison prochaine) qui sont les plus prometteuses. C’est donc sur elles que, dans un premier temps, l’accent sera porté…

Vingt-quatre éducateurs

Parce qu’il veut se donner les moyens de ses ambitions, le centre de formation du Standard regroupera, la saison prochaine, 24 éducateurs, pour un total de 18 équipes alignées, des U8 aux U21. La plupart d’entre eux ont un travail sur le côté et ne disposent donc pas d’un contrat à temps plein. Et 90 % disposent, au minimum, du diplôme UEFA B, beaucoup étant en possession du brevet UEFA A. Au-dessus de la pyramide, l’organigramme de l’Académie s’apprête à subir quelques modifications : ainsi, si Ingrid Vanherle continuera à chapeauter la structure, José Jeunenechamps (qui dirigera aussi les Espoirs) et Thierry Verjans se partageront les responsabilités sportives, avec des tâches bien spécifiques, à condition que la direction du club liégeois trouve un accord avec le deuxième cité.

10 réussites pour 78 millions

Inaugurée il y a dix ans, l’Académie est un investissement que le Standard doit rembourser pendant 27 ans. Elle a donc intérêt à être rentable. Ce qu’elle a été au début. Et même si, ces derniers mois, on a surtout évoqué le départ de certaines pépites, il est intéressant de constater que le club a tiré un profit maximum de deux jeunes rejetés d’Anderlecht, Fellaini et Batshuayi. Quelles ont donc été les plus belles réussites du centre de formation, sportivement, mais surtout financièrement ?

Fellaini : 22 millions. Arrivé à l’Académie à 17 ans, il passera quelques mois dans l’équipe réserve avant d’intégrer le noyau professionnel. Trois ans plus tard, il pulvérise les records belges en matière de transfert lors de son passage à Everton pour, bonus compris, 22 millions d’euros.

Batshuayi : 20,5 millions. C’est à 15 ans qu’il a posé sa valise à Liège. Lancé quelques minutes par D’Onofrio, c’est surtout Rednic qui lui a permis de devenir ce qu’il est et de signer un premier transfert à Marseille. Cette transaction a rapporté 6,5 millions au Standard. Mais lors du deal, Duchâtelet impose une clause de 35 % à la revente. Quand il part à Chelsea, c’est 14 millions de plus qui viennent grossir les caisses liégeoises.

Witsel : 10,4 millions. Celui qui a défrayé la chronique par son transfert en Chine est ce qu’on appelle un pur produit du club puisqu’il y a fait toute sa formation dès l’âge de 10 ans. Son transfert à Benfica rapporte, bonus compris, 8 millions. Mais ses passages au Zenit et à Tianjin vont permettre au Standard d’engranger respectivement 1,6 million et 800.000 euros en indemnités de formation.

Carcela : 8,8 millions. Le Marocain a aussi fait toutes ses classes en Principauté puisqu’il a touché son premier ballon au Standard à 5 ans. En signant un juteux contrat à Anzhi, l’enfant de Droixhe a permis au Standard de palper 7 millions (dont 3 bonus de 500.000 euros). Après un retour quasi gratuit à Sclessin, il est reparti à Benfica alimentant les caisses liégeoises de 1,8 million supplémentaire.

Mangala : 6,9 millions. Comme Fellaini, le Français a mis les pieds en Principauté à 17 ans en provenance de l’UR Namur. En 2011, pour l’attirer à Porto, le club lusitanien a dépensé 6,5 millions avant de le revendre 3 ans plus tard… 48 millions à Manchester City. Une transaction qui a permis au Standard de recevoir 400.000 euros en indemnités de formation.

Mpoku : 4,5 millions. C’est à 12 ans qu’il s’inscrit au Standard avant d’être tenté par une aventure à Tottenham. À l’époque, on parle déjà de la fuite d’un talent qui reviendra finalement en 2011. Lors de l’hiver 2015, il est normalement acheté par Al-Arabi qui n’honore pas ses engagements avant d’être prêté au Chievo. Finalement, le club italien s’offrira le joueur pour 3,8 millions alors que le club du Qatar devra verser une compensation de 750.000 euros au Standard.

Pocognoli : 1,5 million. Il a dix ans quand il s’affilie au Standard. Avant ses 16 ans, il s’engage avec Genk d’où il partira pour les Pays-Bas. En janvier 2010, il retrouve Sclessin pour trois saisons avant d’émigrer en Bundesliga contre un chèque de 1,5 million. Inférieur au montant déboursé par le club principautaire pour le rapatrier de l’AZ.

Benteke : 1,3 million. Lucien D’Onofrio ne croyait pas en lui puisqu’il l’a successivement prêté à Courtrai puis à Malines. Jugeant qu’il n’avait plus d’avenir à Sclessin, il a accepté d’être transféré à Genk avant de connaître la carrière qu’on lui connaît.

Dimata : 1,2 million. L’été dernier, l’attaquant refuse de prolonger à Sclessin et s’engage à Ostende qui débourse 500.000 euros en acceptant de verser 10 % de la revente. Ce qui devrait constituer 700.000 euros quand son départ à Wolfsburg sera officialisé.

De Sart : 1,1 million. Il a dix ans quand il signe au Standard. Il disputera 75 matches chez les Rouches avant de s’envoler à Middlesbrough en janvier 2016 car il ne trouvait pas grâce aux yeux de Ferrera. Il rapporte 1 million au Standard plus un bonus de 100.000 euros suite à la montée du club anglais en Premier League.

Lillo Guarneri, un joyau à conserver

Les supporters du Standard l’avaient découvert à la mi-novembre 2016, alors qu’Aleksandar Jankovic l’avait invité à participer, à l’ombre du stade de Sclessin, à un entraînement de l’effectif professionnel. À quatorze ans seulement ! C’est que Lillo Guarneri, puisque c’est de lui qu’il s’agit, est considéré comme l’un des plus beaux joyaux de l’Académie. Débarqué en U9 à Sclessin en provenance de l’AS Eupen, alors qu’Anderlecht et Genk le courtisaient également, ce tout jeune gardien de but n’est autre que le frère d’Alexandro Cavagnera (18 ans), le médian récupérateur que José Jeunechamps a intégré il y a une quinzaine de jours dans le noyau professionnel du Standard.

L’ITALIE LE VEUT

Sorties aériennes, détente, réussite dans les face-à-face, puissance et grosse personnalité : du haut de son 1,83 mètre alors qu’il fêtera le 8 mai son quinzième anniversaire, Lillo Guarneri s’appuie sur des qualités qui ne laissent personne insensible. Ni les grands clubs belges, qui tous le suivent, ni le top étranger, puisque l’AS Monaco, l’Inter Milan, l’AS Roma, la Juventus et le Bayern Munich lui font les yeux doux. Et sur ce plan-là, son élection au titre de meilleur gardien d’un tournoi U16 disputé en février dernier avec le Standard à Doha, au Qatar, a mis davantage encore ce gamin domicilié à Jemeppe- sur-Meuse, en région liégeoise. Pourtant, Lillo Guarneri, que le club liégeois entend amener le plus vite possible aux portes de l’équipe première, ne donnera suite à aucun intérêt : souhaitant privilégier le violet sportif, il a l’ambition de défendre un jour les buts des Rouches. Mais aussi, qui sait, ceux de la Squadra Azzura, dès l’instant où la fédération italienne de football songe à lui, qui possède la double nationalité.

 

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